Lettre #15 – À mon besoin d’être vu

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Ce matin, à Paris, la pluie m’a poussée à chercher un abri et un peu de chaleur.

Alors j’ai pris un thé et un croissant.

Pas très ayurvédique, mais typiquement Parisien.

Et j’ai regardé les gens passer, chacun pressé, chacun dans son monde.

Et en moi… une vieille voix s’est réveillée.

Toi.

Toi, mon besoin d’être vu.

Tu m’as suivie partout, depuis l’enfance.

À l’école, quand je baissais les yeux pour éviter de répondre,

par peur de me tromper,

par peur de faire rire.

Je faisais semblant de ne pas savoir,

mais à l’intérieur, je brûlais d’avoir quelque chose à dire.

J’ai souvent préféré me cacher dans un coin,

m’effacer pour éviter la lumière.

Mais ce n’était pas de la sagesse, c’était de la peur.

Et pourtant, secrètement, je rêvais d’être au centre,

de parler avec aisance,

de toucher les cœurs,

de briller — mais sans me faire mal.

Il y a eu ces jours où j’ai passé mon chemin,

où j’ai vu quelqu’un dans le besoin,

et je ne me suis pas arrêtée.

Parce que tu étais là,

à me souffler :

« Et si tu te ridiculises ? Et si tu te trompes ? »

Alors j’ai porté un masque d’indifférence,

et j’ai eu mal pendant des jours.

Et puis il y a eu le yoga.

Je l’ai tant aimé…

Et parfois, je l’ai pratiqué

non pas pour me relier à moi-même,

mais pour que l’on me voie.

Pour être reconnue.

Pour me sentir enfin… « valable ».

Mais cela ne dure jamais.

L’admiration ne guérit pas les blessures de l’âme.

Et un jour, j’ai commencé à pratiquer seule,

au petit matin, quand le monde dort encore.

Là, j’ai découvert un autre regard.

Le mien.

Mon corps a changé,

ma pratique a mûri.

Et toi aussi, mon besoin d’être vu,

tu as changé.

Tu es toujours là, parfois.

Je te sens remonter, comme une vieille habitude.

Mais je ne te repousse plus.

Je t’écoute.

Parce qu’au fond, tu ne demandes pas la lumière des projecteurs,

tu demandes l’amour.

Le vrai.

Celui qu’on se donne à soi-même.

Celui qui dit :

« Tu n’as pas besoin d’impressionner pour exister. »

Aujourd’hui, oui, je veux encore être vue.

Mais autrement.

Être vue pour qui je suis vraiment,

quand je tends la main,

quand je dis : « Respire. Ça va passer. »

Quand je rappelle à l’autre — et à moi-même —

que même les tempêtes ont une fin.

Être vue, non pour ce que je fais,

mais pour ce que je transmets.

Pour ce que j’ose aimer, même dans le chaos.

Et peut-être, finalement,

c’est cela, être vu :

laisser briller la paix au milieu du tumulte.

Et marcher, pas à pas,

vers un regard plus doux — sur soi et sur le monde.

Inna

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