
Quand j’étais enfant, je rêvais tout le temps.
De grands amours, d’aventures, de vies plus grandes que nature.
Et j’ai rêvé si fort que, d’une certaine façon,
presque tous mes rêves matériels se sont réalisés.
Mon grand-père disait toujours :
« Il faut devenir quelqu’un. Quelqu’un d’important. »
Alors j’ai essayé.
Je n’étais pas la meilleure à l’école,
mais je voulais être grande, forte, brillante.
Je changeais de rôle comme on change de costume,
selon le film de la veille ou le livre que je lisais.
Je devenais l’héroïne d’autres histoires,
mais jamais celle de ma propre vie.
Je n’ai pas rêvé celle que je suis vraiment.
Je n’ai pas rêvé de moi,
de ce rôle principal que je suis venue incarner,
dans ce film qui se joue sans fin,
ici et maintenant.
Parfois, pourtant, des images de vastes espaces paisibles
surgissaient en moi.
Mais je les chassais :
« Ce n’est pas assez grand. Ce n’est pas assez cool.
Il faut être quelqu’un dans cette vie. »
J’ai rêvé d’être une grande sauveuse,
celle qui secourt les gens en pleine catastrophe.
Mais au fond, peut-être que mes rêves créaient aussi ces tempêtes,
parce que les grands drames naissent parfois
de milliers de petites énergies accumulées.
Je voulais tellement que ma famille voie,
qu’elle comprenne ne serait-ce qu’un éclat
de ce que je voyais.
Et ils ont vu…
Mais à quel prix ?
La guerre les a poussés à venir,
et je me suis parfois demandé
s’ils avaient ressenti la beauté que j’avais imaginée,
ou seulement la douleur de ce que la vie leur imposait.
Alors je me suis même culpabilisée,
me disant que mes rêves étaient peut-être trop puissants.
Oui, mon imagination est une force.
Il faut en prendre soin.
Peut-être faut-il juste rêver plus précisément,
avec plus de tendresse.
Parce que, tu vois,
je n’ai jamais rêvé de gagner un million –
pas assez fort, en tout cas (hahaha !).
Mais je sais aujourd’hui ce que j’ai vraiment envie de rêver.
Ce sont ces rêves oubliés, ou plutôt ignorés,
qui tapent à ma porte.
Au fond, tout ce que j’ai toujours voulu,
c’est être libre.
Libre dans mes choix, dans mes pensées,
et en paix avec moi-même et le monde.
Je veux – et je le désire de tout mon cœur –
que chacun puisse être simplement heureux,
danser, rire,
et se respecter les uns les autres.
Voilà les rêves que je veux réveiller aujourd’hui.
Inna



